À MON AMIE
Le 26 mars 2019
Certaines personnes font irruption dans votre vie et de façon évidente, prennent une place dans votre cœur comme si celle-ci leur avait toujours été destinée.
Les liens se nouent, l’amitié survient, s’exalte, se parle, se rit, se chante, se pérennise et comme un lac au bleu profond, s’installe dans une partie du cristal aux mille facettes qu’est l’amour.
C’est une drôle de chose que l’amour.
Lorsque l’homme de ma vie a surgi dans mon existence, cette émotion intense a trouvé tout naturellement sa place au sein de ce cristal. Elle en a amplifié les vibrations et ma vie en est devenue plus belle à jamais. Nous avons voulu agrandir, prolonger notre union et avons conçu un enfant.
L’amour que je porte à Sacha, sans rien attendre de lui, juste parce qu’il est mon enfant, m’a appris à aimer mon homme pour ce qu’il est. Le bonheur m’a submergée, tellement que je me suis demandé si je parviendrai à chérir autant le deuxième bébé que je portais en moi.
J’ai été surprise par la force et l’intensité de l’attachement que j’éprouvais pour Jeanne. Et j’en ai aimé mon fils d’autant plus.
Line est née et mes sentiments pour mes trois enfants se sont trouvés renforcés à un point que je n’aurais jamais pu imaginer.
Le cristal en moi vibre et scintille, mes amis le font tinter de joie. Marie-Noëlle y a taillé une facette importante, étincelante de complicité, de rires, de papotages, de musique, de lecture, de repas en bord de Marne, de noix croquées aussitôt ramassées, de balades sur son île, de SMS presque quotidiens pour le bonheur de partager, partager, encore et encore.
Mon amie s’est éteinte il y a trois semaines.
Même si je m’y étais préparée, le chagrin m’a assommée.
La facette de notre amitié est toujours là, chatoyante, magnifique, merveilleuse, rien ne pourra jamais la briser.
Alors pourquoi cette douleur, cette flèche dans le ventre, ces sanglots ?
Pourquoi n’est-ce pas uniquement tous les beaux souvenirs avec elle qui se présentent à moi ?
Pourquoi est-ce juste cette immense peine, ce vide énorme ?
Pourquoi ne puis-je seulement ressentir cette chance extraordinaire que mon amie ait partagé ma vie ?
Je pleure en m’engueulant car je sais qu’elle ne serait pas contente de me voir comme cela. La boîte de mouchoirs est vide, du rouleau d’essuie-tout ne reste que le carton, je me mouche dans du papier toilette.
Je sais qu’un jour je parviendrai à penser à elle sans verser de larmes.
Je sais que le temps du deuil est un temps incompressible… et patali et patalo…
Mais moi, je n’ai pas envie qu’elle ne soit plus là. Même si je sais qu’elle est partie en étant heureuse de la belle vie qu’elle avait vécue.
Je nourris mon corps qui a mal au ventre, je désaltère ma bouche qui a soif, je revêts mon masque social et vaque à mes occupations, je n’ai envie que des bras de mon homme et des baisers de mes enfants, je suis fatiguée.
Alors j’écris, car seule l’écriture m’apaise. Je confie mon chagrin à mon stylo qui m’en décharge en le posant sur le papier, les mots s’ordonnent et calment ma pensée.
Je saisis un livre qu’elle m’a offert, le serre contre moi et je remercie la vie qui me permet d’aimer.